En Bretagne, les habitants se relaient pour faire tourner l’épicerie de leur village

Plélo, Guern, Bazouges-la-Pérouse… En Bretagne, nombreux sont les citoyens à se mobiliser pour tenir des épiceries participatives, redynamiser leurs centres bourg et ainsi trouver une alternative aux supermarchés. Reportage à Guern, dans le Morbihan.

En remontant la rue de la vallée jouxtant la mairie de Guern (Morbihan), l’ancienne garderie a laissé place aux rayons de jus de pomme, conserves, fruits et légumes de saison et céréales en tout genre. « Dans la commune on avait encore un dépôt de pain, mais pour le reste, il fallait prendre la voiture pour aller au supermarché, à 20 minutes d’ici », déplore Adeline Commeureuc, membre bénévole de l’épicerie.

Pour faire tourner la boutique, 75 familles se passent le flambeau tour à tour, depuis l’ouverture il y a six mois. « Chaque famille donne bénévolement deux heures de son temps par semaine, explique Nicolas Champot, également bénévole. Les produits sont majoritairement locaux, et le vrac est fourni par la Biocoop de Pontivy, à prix coûtant. »

Deux heures par famille et par semaine

La chambre régionale d’économie sociale et solidaire (Cress) Bretagne dénombrait 46 structures ayant une activité d’épicerie de type économie sociale et solidaire en milieu rural en 2021 (derniers chiffres disponibles). « Ces lieux sont relativement jeunes. Parmi elles, 10 existent depuis 5 ans, explique David Ison, chargé de mission Observatoire au Cress Bretagne. Il y a deux grandes dynamiques : les revitalisations de commerces et de cafés grâce à la mobilisation citoyenne et les tiers lieux, plus hybrides où se partagent différents pôles, cafés, épiceries etc. », explique David Ison. Il ajoute : « Ces lieux sont de vrais espaces collectifs qui maillent les territoires ruraux créant du lien grâce à d’autres associations, ateliers, débats concerts… »

« Les produits sont majoritairement locaux, et le vrac est fourni par la Biocoop de Pontivy, à prix coûtant », explique Nicolas Champot, bénévole à l’épicerie de Guern. 

 Monépi, un logiciel gratuit pour gérer les épiceries

Bien qu’elles soient globalement récentes, le principe des épiceries en circuit court s’est développé dès la fin des années 1990. David Ison rappelle que, « historiquement, la Bretagne n’est pas une terre de circuit court. L’agro-industrie présente dans notre région favorise plutôt les circuit longs. Cependant il y a toujours eu une dynamique de cafés associatifs. » Mais c’est la démocratisation des outils numériques qui facilite le développement de ces épiceries. C’est le cas pour Guern, qui fonctionne grâce à un logiciel gratuit et ouvert à tous : monépi.

« Le logiciel permet de façon simple de gérer une épicerie de A à Z, de faire le lien entre producteurs, bénévoles et familles », explique Alain Poullot, co-créateur de monépi. Créée en 2017, cette start-up arrive à tirer ses bénéfices en prenant 3 % des auprès de producteurs (inscrits sur la plateforme) ayant un chiffre d’affaire de plus de 10 000 euros. Alain Poullot précise : « Derrière monépi c’est un projet de bien commun. On n’a que quatre salariés à temps partiel. Le reste est bénévole. » En Bretagne, 10 structures utilisent la plateforme, dont 4 en cours de création.

Le modèle économique

Pour financer ces épiceries, les communes mettent souvent la main au portefeuille, comme à Guern, où le local est prêté par la mairie. « On paye également les charges et la municipalité a donné un coup de pouce de 500 à 1 000 € », précise Joseph Le Bouédec, maire de Guern. À cela elles peuvent bénéficier d’une aide à la création « dans le cadre de redynamisation des centres bourgs. Mais sinon, ces épiceries ont des dynamiques commerciales, donc pas d’autres aides publiques », précise David Ison.

Malgré tout, le supermarché reste encore bien ancré dans les pratiques. « Beaucoup de familles restent habituées aux marques. Pour venir faire ses courses ici, il faut commander sur internet. C’est un pli à prendre, mais une fois qu’on a le rythme, on peut trouver l’essentiel dont une famille peut avoir besoin  », ajoute Adeline Commeureuc. « Il y a toujours une impulsion à l’ouverture de ces épiceries. L’enjeu c’est de réussir à motiver les bénévoles sur le temps long  », ajoute David Ison.

Article Ouest-France

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